Le Bocage - Journal du jardin


Carnet d'observations, d'expérimentations et de réflexions

dans le cours du jardinage d'un boisé en Haute-Amérique


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17 décembre 2006

Planifier le jardin en fonction des changements climatiques

Plusieurs jardiniers se réjouissent à la possibilité que le réchauffement de la planète leur ouvrira l'accès à des plantes croissant en latitudes plus basses qui n'étaient pas rustiques chez eux. C'est un pari risqué. L'inverse est plus probable, soit le développement de conditions hivernales plus difficiles.

Il y a deux grands types de scénarios en matière de changements climatiques. Le premier que nous vivons actuellement, est celui de changements graduels. Le second type de scénarios qui pourraient survenir à un moment encore indéterminé est celui du passage d'un point de bascule qui entrainera un bouleversement complet des climats vers un nouveau point d'équilibre.

Oublions ici les scénarios du second type, trop radicaux et indéfinis pour le moment, et concentrons-nous sur ceux de changements graduels.

Pour le sud-ouest du Québec, par exemple, on n’envisage actuellement pas de changements drastiques. Les projections d'impacts sur l'agriculture indiquent que cette région pourrait connaître d'ici cinquante ans :
- des températures semblables à la Pennsylvanie (gain théorique d'un point de zonage de rusticité) ;
- peut-être un peu plus de précipitations (les Grands Lacs et la Baie d'Hudson demeurant dégagés de glace) ;
- pas de changements dramatiques sur le plan des insectes nuisibles ; mais
- une multiplication des évènements extrêmes (Montréal est presque exactement à mi-chemin entre le pôle et l'équateur : la région demeure donc bien placée pour sentir l'intensification des effets de yoyo entre systèmes arctiques et tropicaux ainsi que les restes d'ouragans de plus en plus puissants et nombreux).
Bref, de meilleurs étés pour le maïs, mais des hivers plus durs pour les pommes.

Or, si souvent en agriculture, on peut changer de variétés chaque année ou lors de chaque rotation, en jardinage, les arbres, arbustes et vivaces sont destinés à s'établir pour longtemps. Des générations même.

En Basses-Laurentides, je m'inquiète donc surtout de la survenue plus fréquente de périodes de grand froid sans l'habituel couvert de neige l'hiver, et de périodes sèches l'été. J'ai donc décidé de ne pas prendre de risque, c'est-à-dire :

a) ne choisir que des plantes :
- plus rustiques que zonées 5 que me permet théoriquement le site protégé (favorisant l'accumulation de neige) que constitue le boisé (donc des plantes zonées 4 ou moins, mais également résistantes à la chaleur l'été) ; et
- capables de supporter des périodes de temps sec (heureusement, Le Bocage est dans une cuvette qui profite du drainage des collines avoisinantes) ;

b) aménager un réseau de rigoles superficielles qui drainera la fonte printanière et les coups d'eau ponctuels, mais pourra également servir de réservoir en entravant l'écoulement de l'eau en les remplissant de feuilles mortes ou autres paillis végétal ;

c) avoir retenu le coin le plus sec pour y installer L'enceinte un lieu de recueillement sur une sorte de terrasse de pierres en surplomp qui fera profiter les plantes autour de l'eau de pluie qu'elle recevra ;

d) préserver un bon entrelacement des branches dans la canopée qui peuvent ainsi se supporter les unes et les autres lors d'épisodes de verglas ou de grands vents ;

e) tenir un registre d'observations du jardin en fonction de la température et des précipitations afin de bien connaître la tolérance du jardin et des plantes individuelles à différents types de conditions ; et surtout

f) paillage, paillage, paillage : on ne peut trop insister sur le maintien d'un épais paillis à l'année longue pour protéger le sol et les plantes des écarts soudain de températures de l'air, notamment des redoux et coups de froid l'hiver ainsi que les gels et canicules l'été.

Au total, rien de bien plus que ce que proposent déjà des pratiques prudentes ou conservatrices de jardinage.

En souhaitant que l'humanité soit suffisamment sage pour éviter les conditions qui provoqueraient les scénarios à point de bascule...

(mis à jour les 8, puis 23 janvier 2006)

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