Le Bocage - Journal du jardin


Carnet d'observations, d'expérimentations et de réflexions

dans le cours du jardinage d'un boisé en Haute-Amérique


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03 février 2007

Tour du jardin

photo M.-J. Musiol :  saruma Alternance de soleil et de nuages, maximum - 7 °C.

Pour la première fois, je me lance dans les semis intérieurs hivernaux. Des pavots bleus de l'Himalaya (Meconopsis betonicifolia) sur pastilles de sphaigne dans des plateaux-serres de fenêtre.

Un arboriculteur est venu aujourd'hui évaluer le travail qu'il devra faire cette semaine pour élaguer et abattre sans trop de dommage le gros érable rouge trop profondément écorcé pour survivre. Après j'ai abattue un arbre surnuméraire dans La Reposée. Puis poursuivis le débitage de l'érable rouge renversé par le vent l'été dernier dans La Réserve.

* * *

Ciel, j'ai manqué jusqu'ici à mes devoirs d'hospitalité. Il me faut vous offrir un tour du jardin (ici version janvier 2007 du projet - ce que je décris ci-après est souvent à l'état embryonnaire, cela pousse lentement à l'ombre).


Plan courant du sous-bois du Bocage
« Le Bocage ». Boscage, mot pour la première fois recensé en 1138 qui possède aujourd'hui deux sens. Le plus ancien est petit bois ombragé. Petit, Le Bocage l'est. Quelque 850 mètres carrés seulement. Boisé et ombragé aussi. C'est une érablière à bouleau jaune typique. Le terme désigne aussi un un petit bois sans culture, planté à la campagne pour se mettre à l'ombre. Nous sommes bien à la campagne et Le Bocage nous permet justement de séjourner à l'ombre par jour ensoleillé. Il n'a cependant pas été planté. Il est apparu naturellement. Mais comme jardin, il accueille désormais des cultures au niveau des vivaces et des arbustes.

Le second sens du mot désigne un type de paysage où les champs et des prés sont enclos par des haies vives et des arbres. Pas de champs ou de prés ici, ni même de véritable paysage. Cependant, Le Bocage est effectivement enclos sur trois côtés par une haie libre mixte d'arbustes (sureaux, viornes, physocarpes et fusains de diverses espèces et variétés - il me faut compléter la plantation du troisième côté au nord-est dans le prolongement du boisé chez le voisin) et par un talus surmonté d'une haie bien taillée de thuyas sur son côté sud-est. À l'intérieur, d'autres haies d'arbustes structurent le jardin en délimitant les différentes pièces, dont trois sont complètement fermées.

On accède au Bocage par la cour arrière de la maison qui est le jardin de soleil — le royaume de Blonde — que le boisé borde et surplombe un peu. Un grand bouleau jaune domine l'ensemble. Une trouée dans les arbres en direction ouest laisse entrevoir un autre boisé plus loin qui cache désormais la flèche argentée du clocher d'une petite chapelle.

La haie de thuyas, bien établie, comporte une ouverture sous le grand bouleau jaune qui domine la bordure sud-est. C'est l'entrée de mon domaine à moi, Le Bocage dont le plancher se trouve quelque quatre mètres plus bas. Il n'y a pas encore d’escalier, même si la plateforme d'accès est déjà là. Ici, nous sommes déjà accueillis par un grand sureau rouge (sambucus pubens) qui longe une large part de la descente du futur escalier.

Sureau rouge (sambucus pubens)En bas, nous nous retrouvons au creux d'un vallon, presque sur l'ancien lit d'un
ruisseau aujourd'hui disparu. On entrevoit d'ailleurs, tout près et ailleurs, deux ruisselets qui se joignent sans le jardin avant d'achever de le traverser.

En le prenant le sentier de bois raméal fragmenté vers le nord, on traverse un des ruisselets qui le longe un moment. De part et d'autres, deux petites cascatelles (autre joli mot) glougloutent doucement. Entre les deux, à droite, un discret chapelet de pierres plates. Elles mènent, derrière les rochers, à une pièce fermée par des plants de cornouillers à grappes (cornus racemosa) et de sureaux plumeux dorés (sambucus racemosa ‘Sutherland gold’). Au-dessus d'un lit d’aspérules odorantes entouré de mélisse citronnelle pour éloigner les moustiques est suspendu l’été un hamac maya multicolore. C'est La Reposée, expression qui désigne un endroit de repos diurne d'un animal. L'animal ici, c'est bibi. Il y a deux autres cascatelles qui glougloutent délicatement tout près au printemps et lorsqu'il a plu beaucoup.

Immédiatement après la discrète piste vers La Reposée, le sentier rencontre à droite une véritable allée de pierres plates menant à une plateforme avec le même recouvrement. C’est Le Salon. Évidemment une pièce aménagée pour recevoir famille, amis et autres visiteurs. Cependant, en jardin, ce mot désigne également un espace garni de bancs, aménagé au milieu des arbres d'un parc. Le Salon est exactement cela. Il offre plusieurs points de vue sur le jardin grâce à une structure où les murs séparant la plupart des pièces convergent vers Le Salon.

En poursuivant sur le sentier qui à un moment bifurque abruptement vers la gauche, traverse une sorte de jardin de roches et blocs erratiques. La sortie de cette section est marquée par la traversée de l'autre ruisselet. Bientôt, on passe devant une large haie de deux ou trois rangs de harts rouges à droite, juste devant la grande talle de fougère en face. C'est L'Enceinte, qui encercle et protège une sorte de sanctuaire tranquille, lui-même circulaire qui comportera un unique banc massif, rond également, tout au centre. Lorque cette haie sera mature, elle isolera de l'extérieur en ne permettant que la vue du ciel et de la canopée autour. La sensation d'enveloppement et d'isolement est complète puisque l'unique entrée pénètre la haie en une spirale. Même l’hiver, on se verra entouré de centaines de belles tiges rouges contrastant avec la neige.

Le sentier poursuit en faisant un long virage vers la gauche, passe devant une pièce entièrement couverte de plantes à grand feuillage (tussilages, pétasites, ligulaires) puis par-dessus une cascatelle bruyante des débits combinés des deux ruisselets. Immédiatement après, un autre discret chapelet de pierres plates mène à La Réserve où se retrouvent, cachés par de nombreux arbustes, deux piles à compost, des amas de terre et de feuilles mortes, une pépinière et la décharge du ruisselet avec bassin de décantation.

Puis, c'est le retour à l’escalier. Voilà.

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